La prévention des impayés grâce à l’analyse financière du client
Le bilan financier d’une entreprise a de manière générale pour objectif de dresser une analyse de sa solvabilité et de sa rentabilité en se basant sur les données comptables. Ce bilan est notamment utilisé en interne afin d’accueillir de nouveaux investisseurs au sein du capital social ou auprès d’une société tierce lors d’un projet de rachat de cette dernière. L’objectif de la lecture de ces chiffres est de déterminer si l’activité commerciale de l’entreprise est rentable à court, moyen et long terme.
Les méthodes couramment utilisées pour effectuer cette analyse client peuvent être mises à profit de la prévention des impayés. Dans cet article, nous allons voir comment l’analyse financière jouer ce rôle de prévention. Nous évoquerons quels indicateurs sont à étudier dans cette analyse et quels outils peuvent faciliter cette tâche. Enfin nous vous donnerons les clés pour interpréter les chiffres qui en ressortent.
Quel est l’intérêt de réaliser une analyse financière client ?
Avant même d’évoquer le recouvrement de créances, il existe tout un processus qui englobe la négociation du contrat avec le client, la facturation de la prestation et la réalisation de la prestation. Chacune de ces étapes peut être accompagnée d’une procédure de gestion du risque client qui vise à anticiper la capacité du client à honorer le paiement de sa facture. Mais là où réside la partie la plus importante du risk management se trouve encore en amont de tout ceci.
C’est avant même d’entamer toute démarche commerciale avec le potentiel client que les capacités de lecture et d’interprétation des données financières d’une entreprise se révèlent stratégiques. On peut donc considérer que l’audit financier joue un rôle de prévention du risque tandis que le recouvrement occupe un rôle curatif suite à l’identification d’un litige.
Tout l’intérêt de cette démarche est de pouvoir étudier le profil du client avant d’engager toute relation commerciale. C’est un gain de temps pour les équipes mais aussi un gain d’argent ! En minimisant le risque d’impayés, les encaissements de l’entreprise se font plus rapidement.
Quels indicateurs surveiller lors d’une analyse financière ?
Lorsque l’on souhaite procéder à l’analyse financière d’un potentiel client, plusieurs indicateurs fournissent des informations qui permettent de rendre compte de sa solvabilité. Cette procédure n’est pas obligatoire et les différentes étapes de cette démarche ne sont pas à respecter systématiquement.
L’analyse financière du client repose sur la lecture des comptes annuels de ce dernier. Vous pouvez les coupler à d'autres informations d'ordre financier. Nous avons listé toutes les sources qui vous permettront d'obtenir des données fiables. La plupart d'entre elles sont en accès gratuit.
Une fois les comptes annuels obtenus, l’audit financier du client repose sur 4 dimensions :
- Son profil et son activité
- Sa rentabilité
- Sa structure financière
- Sa trésorerie
Le profil du client et son activité
Bien que les indicateurs chiffrés constituent une part non négligeable de cette analyse, observer d’autres éléments quantitatifs permet de mettre en perspective les résultats observés. La qualité de l’étude en bénéficiera grandement.
Il est alors conseillé de débuter par l’étude de :
- L’environnement du client : dans quel secteur d’activité évolue-t-il ? Y a-t-il une forte concurrence ? Comment se comportent ses clients ?
- L’activité du client : Dans quel état se trouve son portefeuille clients ? Quel est son chiffre d’affaires ?
À la simple observation de ces quelques points, il est déjà possible d’avoir un aperçu de la fiabilité de ce client.
Si l’on souhaite tout de même faire parler les chiffres, c’est à ce moment que la vérification de sa solvabilité trouve son intérêt.
La rentabilité
Calculer la rentabilité d’une entreprise et l’interprétation que l’on peut en tirer dépend de la granularité avec laquelle les données sont étudiées. On peut donc distinguer dans ce calcul 3 étapes qui permettent d’ajouter de la précision dans le calcul de la rentabilité d’un client :
- Le taux entre la variation du bénéfice et la variation du chiffre d’affaires
- La comparaison de ce taux avec les moyennes du secteur (si ces données sont accessibles) et sa variation dans le temps afin de déterminer où se situe le client au sein de son secteur d’activité et s'il connaît une période de croissance ou non.
Enfin, il est possible de détailler plus précisément la rentabilité d’une société en se penchant sur :
- Les soldes intermédiaires de gestion (SIG), qui constituent des indicateurs ne retenant qu’une partie des charges de l’entreprise. Ils permettent ainsi d’identifier quels types de charges le client a le plus de mal à gérer.
- La capacité d’autofinancement (CAF) qui correspond au montant de trésorerie que l’entreprise obtient grâce à son activité. C’est un indicateur largement utilisé pour déterminer la solvabilité et il peut être obtenu par le calcul suivant :
CAF = Résultat de l’exercice + Dotations - Reprises
La structure financière
La rentabilité est une chose mais lorsque l’on procède à l’analyse de la solvabilité d’un futur client, la lecture du bilan permet d’obtenir une vision globale de sa structure financière. C’est à travers 3 indicateurs de solvabilité qu’il est possible de l’évaluer :
- Les capitaux qui correspondent au capital, au résultat de l’exercice et aux réserves de l’entreprise.
- L’endettement, dont le poids dans les finances peut directement amener l’entreprise à entrer en défaillance.
- Le BFR ou besoin en fonds de roulement qui correspond à la somme nécessaire à l’entreprise pour financer son activité. Sa valeur, calculée en nombre de jours, a un impact important sur le niveau de trésorerie. Un BFR élevé implique un risque majeur de difficultés financières. Cet indicateur fournit donc des informations précieuses sur la capacité du client à bien honorer le paiement de ses factures fournisseurs.
La trésorerie et les liquidités
L’ensemble des indicateurs évoqués précédemment influencent la trésorerie du client. Pour analyser sa qualité, il est possible d’étudier la trésorerie lors du bilan ainsi que le cash flow, c’est-à-dire les liquidités, dont dispose l’entreprise pour assurer son développement.
- La trésorerie au bilan est un indicateur qui manque de précision car il est établi lors du bilan comptable de l’entreprise. Il rend compte de l’état de la trésorerie à un instant T et ne met pas en valeur les fluctuations d’encaissements que peut connaître une société au cours d’une année. Pour rendre compte de manière plus détaillée les liquidités dont dispose un client, il est préférable de se pencher sur l’analyse du cash flow.
Le cash flow ou liquidités :
- Le cash flow from operations ou flux de trésorerie opérationnel en français correspond au montant de liquidité généré par les activités opérationnelles courantes d’une société. Ici, on ne prend donc pas en compte ses investissement ou ses financements. Il se calcule de la manière suivante :
Cash flow from operations = CAF - BFR
- Le free cash flow se traduit en français par “flux de trésorerie disponible” et indique le montant de trésorerie restant à une entreprise après avoir déduit les charges nécessaires à son activité et à son développement. Voici la formule qui permet de le calculer :
Free cash flow = Excédent brut d’exploitation (EBE) - impôt sur le résultat d’exploitation +/- variation des besoins en fonds de roulement - investissement(s) + désinvestissement(s)
Quels outils utiliser pour faciliter l’analyse financière ?
Effectuer l’analyse de chacun de ces indicateurs est une tâche longue et complexe. Bien que son impact sur le long terme soit bénéfique pour une entreprise, son coût en temps et en mobilisation de connaissances peut être lourd. Notamment si la signature de ce client est vitale pour le maintien de l’activité de la société.
Afin d’accélérer ce processus d’audit, des organismes mettent à disposition publiquement un système de notation représentant le degré de solvabilité des entreprises. *Il est par exemple possible de consulter sur la
Il est par exemple possible de consulter sur la plateforme de la DGCCRF l’existence ou non d’antécédents d’impayés pour une entreprise.
D'ailleurs, pour vous faciliter la tâche, nous avons créé un fichier Excel qui compile toutes les sanctions infligées par la DGCCRF depuis 2015 aux sociétés qui ne respectent pas les délais de paiement. Le fichier se met à jour en temps réel et il est possible de le filtrer par date, montant de l'amende, nom de l'entreprise et SIRET. Soyez vigilant si vous y trouvez le nom d'un client ou d'un prospect.
Les sociétés d’assurance crédit ou les agences de notation disposent elles aussi d’un barème de scoring financier qui leur permet d’évaluer la fiabilité d’un potentiel client.
Ces outils, accessibles en ligne, facilitent grandement la démarche d’analyse financière du client. Il reste cependant conseillé d’effectuer une seconde étude en parallèle afin de confirmer la véracité de ces résultats.
Comment interpréter l’analyse financière du client ?
Une fois l’analyse financière d’un client effectuée, quelles actions mettre en place ?
Le cas idéal est celui où son profil financier ne présente pas de risque pour une future collaboration. Dans cette situation, la relation commerciale peut être lancée et les contrats négociés.
À l’inverse, si les résultats de l’étude financière se révèlent mauvais, plusieurs dispositions peuvent être prises :
- Le refus de travailler avec ce client : décision radicale que toutes les entreprises n'ont pas le luxe de pouvoir prendre.
- La négociation du délai de paiement : connaissant les antécédents et la capacité de trésorerie du client, un délai de paiement aménagé pour lui faciliter le règlement de ses factures peut être envisagé.
- Proposer un escompte commercial : pour faire disparaître tout risque d’impayé, un escompte peut être proposé au client pour le règlement de sa créance. Cette démarche consiste à lui offrir l’opportunité de régler immédiatement la prestation en échange d’une réduction sur le tarif appliqué. Cette méthode est avantageuse pour tout le monde et peut grandement favoriser le maintien d’une bonne relation commerciale par la suite.