Entretien avec Jean-Baptiste Cousin, co-fondateur de SMASH Group
SMASH Group, cabinet de fonctions support à temps partagé, est un partenaire de longue date de LeanPay. Nous avions déjà rencontré Nicolas Poux qui nous avait parlé de la mise en place de LeanPay dans l’agence événementielle black lemon.
Aujourd’hui, c’est avec Jean-Baptiste Cousin, co-fondateur de SMASH Group, que nous nous entretenons. Il nous explique l’intérêt de faire appel à un DAF externe. Puis, il nous donne ses recommandations pour avoir une bonne gestion du cash. En fin d’échange, il nous livre sa vision du métier de DAF : son évolution depuis cinq ans et ses projections.
Pouvez-vous nous présenter ce qu’est SMASH Group ? Quels types de missions exercez-vous ?
SMASH Group, c’est un cabinet qui propose aux dirigeants de startups et PME des fonctions support à temps partagé : finance, RH, juridique et administratif. J’aime bien dire que nous sommes la voie du milieu entre le conseil traditionnel et le recrutement d’un interne. L’idée, c’est de faire le même métier qu’une personne qui aurait été recrutée en interne, sauf qu’à la place d’un temps plein, nous intervenons seulement quelques jours par mois. Nos missions vont de 3 jours par mois jusqu’à 15 jours selon les besoins.
Nous nous différencions par nos profils à forte valeur opérationnelle avec 3 niveaux de séniorité. Par exemple sur la finance, nous avons des contrôleurs de gestion, des responsables financiers et des directeurs financiers. Notre approche n’est pas de vous dire quoi faire mais de faire. Nous recommandons de prendre deux à trois stacks en même temps car cela favorise la synergie entre les équipes.
En nous choisissant, les dirigeants gagnent du temps, de la sérénité et de la robustesse. Ils se concentrent enfin sur la stratégie et le développement de leur entreprise.
Aujourd’hui, ce sont plus de 200 clients qui nous font confiance.
Quels sont les avantages à recourir à un DAF externe plutôt qu’interne ?
Lorsque l’on recrute quelqu’un en interne, c’est en fonction d’un momentum. Deux ans plus tard, l’entreprise a évolué et elle ne rencontre plus les mêmes problématiques. Il se peut alors que le profil de la personne en interne ne soit plus tout à fait adapté aux besoins à date. A contrario, avec une offre de DAF en part-time, on peut sélectionner les bonnes personnes en fonction des compétences requises pour répondre aux besoins du moment.
Le deuxième avantage concerne tout le pan de formation. Avec 45 personnes dans une équipe, il y a peu de questions sans réponses. L’accès à des experts est facilité. Alors que, quand j’étais DAF en entreprise, j’étais tout seul. Si j’avais une question, il fallait que je me débrouille. Cela pouvait prendre du temps et il n’était pas sûr que j’obtienne une réponse adaptée.
Autre atout, c’est la flexibilité apportée aux dirigeants. S’il y a un trou de trésorerie, il est très facile de réduire le nombre de jours ou de stopper complètement le contrat. Pour qu’un “CDI” ait un impact dans le P&L, il faut compter 6 mois. Notre préavis pour tout arrêter, lui, est de 15 jours.
Enfin, le dernier avantage, c’est cette posture interne/externe qui nous permet de neutraliser les affects. Lorsqu’on est DAF salarié, il y a des choses qu’on ne va pas oser dire ou faire. Le fait d’être externe nous permet une liberté totale permanente : on est cash avec les dirigeants et on prend toujours les meilleures décisions possibles pour l’entreprise.
Qu’est-ce qui vous différencie des autres cabinets de DAF à temps partagé ?
D’abord, c’est notre histoire personnelle. Nous venons du métier : nous étions DAF avant. Ensuite, c’est la façon dont nous voyons la profession. Nous ne faisons pas simplement du reporting et de la mise à jour de chiffres. Nous nous occupons aussi de l’administratif, des opérations, des process. Nous sommes au contact des gens.
De plus, notre équipe est composée de profils très variés qui ont des expériences diversifiées : audit, contrôle de gestion, financement, banque etc. Nous souhaitons créer une sorte de méga cerveau dans lequel on retrouve toutes les couleurs de la finance.
Enfin, il y a notre style ! Nous voulons rafraîchir et donner un vent de modernité à une fonction qui est généralement vue comme poussiéreuse et traditionnelle. Ce que nous disons aux dirigeants, c’est que nous sommes comme eux : nous parlons le même langage. Globalement, nous venons en jean/baskets, mais s’il faut venir en costard, nous le ferons aussi :-)
En quoi un partenariat avec LeanPay fait sens pour SMASH Group ?
Ce que nous recherchons, c’est travailler avec des partenaires utiles pour nos clients. Donc, avant d’engager un partenariat, nous passons en revue pas mal de points et notamment si l’outil a une utilité à plus d’un client et sa pérennité. Il faut que nous soyons sûrs de nos choix car s’il n’est pas à la hauteur des attentes, c’est nous que le client tiendra pour responsables et pas l’outil. Parce que c’est nous qui l’avons proposé. Nous attendons du partenaire qu’il ait de la puissance, de la vélocité, de la ressource pour aller vite et développer le produit.
En ce qui concerne LeanPay, c’est un partenariat qui fait totalement sens car nous avions déjà déployé l’outil chez certains clients. Nous avions donc pu le tester et l’éprouver en amont. Nous en sommes très contents et nos clients aussi !
Une étude menée par PwC et la DFCG révèle que la priorité des DAF pour 2023 est le pilotage de la performance et la gestion du cash. Est-ce ce que vous constatez lors de vos missions ?
Bien évidemment ! Le pilotage de la performance et la gestion du cash restent les sujets prioritaires. Le dirigeant veut qu’on lui donne les moyens de comprendre la performance ou la sous-performance de son entreprise.
Chez SMASH, nous avons coutume de dire que 2022 a été une année exceptionnelle (dans le sens qui sort de l’ordinaire) au même titre que les années 2020 et 2021 avec l’ère COVID. En 2022, on a connu une euphorie générale. Or, les résultats de cette année ont été biaisés par les aides de l’Etat, par des budgets eux-mêmes biaisés puisque non dépensés en 2021 etc.
C’est pour cela que 2023 sera une année normative. Elle va permettre à chaque entreprise de dresser un constat de l’état actuel des choses en ce qui concerne ses clients, ses fournisseurs, ses concurrents etc. Il s’agit d’un moment charnière durant lequel il faut rester vigilant. On se rendra peut-être compte que tout ce qui a été pensé depuis trois ans est faux ! Nous recommandons donc de dépenser peu quitte à ralentir un peu les investissements et la croissance. Il vaut mieux croître moins mais croître mieux.
L’entreprise post-covid, c’est comme un bateau qui vient de subir une tempête : il faut d’abord faire un état des lieux de la casse et de ce qui a été endommagé avant de réparer. Et, surtout, on ne repart pas illico à vive allure !
Quelles sont vos recommandations pour justement avoir une bonne gestion du cash ?
La première recommandation que je donnerais, c’est d’automatiser le suivi et d’avoir une bonne connaissance du cash. En termes de créances clients, il faut être capable d’identifier ce qu’on a, ce qu’on devrait avoir et dans quelle temporalité. Même chose avec les décaissements.
Il faut sortir de l’artisanal et passer à un système professionnel soit avec un fichier Excel qui combine des techniques de modélisation avancées, soit avec un outil digital. Un Excel conçu par des experts, c’est quasiment un mini outil qui scrape les comptes bancaires, le CRM, la comptabilité etc. Il permet de s’affranchir de l’approximatif et de s’assurer que ce qu’on analyse est parfaitement juste.
Le deuxième conseil, c’est de bien cadrer ses process et d’être clair et transparent sur les conditions de paiement. Par exemple, avec un fournisseur, j’annonce directement que je paye à 30 ou 60 jours. S’il n’est pas d‘accord avec cela, nous pouvons en discuter évidemment, mais il est informé. De la même manière, lorsqu’on signe avec un client, il a une deadline. Tout est prévu dans le contrat et les CGV. Tous ces process calibrent une prise de conscience globale.
En dernier point, je pense particulièrement à la culture cash. S’il y a uniquement le DAF et le dirigeant qui se préoccupent du cash, c’est bien mais pas suffisant. Il faut instaurer une culture cash auprès des personnes de l’équipe et sensibiliser tout le monde que, chaque mois, il faut du cash pour payer les salaires, les bureaux etc.
Comment le métier de DAF a évolué ces 5 dernières années ?
Ce que j’ai le plus constaté, c’est la digitalisation. On a vu fleurir sur le marché beaucoup d’outils, tels que le vôtre, très faciles à installer. Le champ des possibles est large et cela rend le choix plus compliqué. La limite, c’est qu’on se retrouve vite avec une palette de 15 outils pour gérer une entreprise.
Notre métier devient de plus en plus tech également. Il est beaucoup moins tourné vers le traitement manuel des opérations et plus vers l’automatisation et la sécurisation. Concrètement, si on a un système qui permet d’avoir son cashflow quand on ouvre son ordinateur, on ne s’est pas embêté à faire un fichier Excel à outrance et on peut passer du temps ailleurs et notamment sur l’analyse et la recommandation. Par exemple, nous nous étions rendus compte dans une entreprise que l’équipe commerciale n’avait pas d’outil de négociation. Or, si on ne connaît pas le prix plancher et le prix de revient, comment bien négocier ? On peut donc conseiller et mettre en place un outil.
Au sujet de la dématérialisation des factures, je me souviens que lorsque j’étais DAF, je faisais mes factures sur Salesforce, je les imprimais, je les mettais dans des enveloppes et je les envoyais par la Poste. Désormais, tout est automatique, même le système de relances avec LeanPay ! Avant, on recevait à peu près 50% des factures par papier, et maintenant, c’est seulement 20%. On pourrait atteindre les 100% si on obligeait tous les fournisseurs à ne pas les envoyer par papier.
C’est une révolution qui rend le métier beaucoup plus véloce et surtout beaucoup plus accessible à des gens plus jeunes et qui ont une culture tech et process plus forte.
Quelles sont vos projections de grandes mutations de cette fonction ?
La réponse n’est pas la même selon la taille d’entreprise. Il n’y a pas d’harmonisation parfaite et d’homogénéisation des process dans les petites entreprises par exemple. Il est très difficile de gérer ces arbitrages car il y a toujours des particularités. Et puis il y aura toujours les petites entreprises qui travaillent avec les grosses et qui doivent se conformer à leurs exigences, comme l’agence black lemon avec l’Oréal.
Globalement, je pense que la projection se fera sur les outils : moins d’outils mais plus d’outils centraux. S’ensuit alors l’importance de la data, et pas seulement financière. Parce que travailler avec plus d’outils signifie récolter plus d’informations. On aura davantage les moyens d’optimiser les process en partant de la data plutôt que de la discussion.
Les cabinets de conseil proposent aux grands groupes des prestations dans lesquelles ils analysent toutes les spécifications de leurs outils (logiciel comptable, CRM etc). Ils identifient tous les comportements et les ruptures de chaîne grâce à l’utilisation massive d’outils de gestion. J’espère qu’on arrivera un jour à avoir ce niveau de détail pour les petites entreprises.
Vous avez beaucoup d’agences parmi vos clients. Quelles sont les problématiques en termes de gestion du poste clients spécifiques à cette typologie de clients ?
Prenons l’exemple d’une agence événementielle. La première problématique, c’est qu’on est rarement payé avant de commencer à travailler. La facturation est en effet découpée en diverses tranches sur un même projet : acompte, avancement et solde. On court toujours après les informations : qui chez le client peut valider les factures ? Qui peut les payer ? Quand on travaille avec un grand groupe, entre le contact opérationnel et le comptable interne, il y a 5/6 personnes. Alors déjà, on ne sait pas qui sont les bonnes personnes. En plus, il y a beaucoup de parties prenantes entre la réception de la facture, sa validation et son paiement. Il peut se passer 3 mois avant qu’on ne touche l’argent. Pour éviter tout cela, il faudrait mettre en place le prélèvement mais c’est impossible avec les grands groupes.
L’autre problématique, c’est la capacité des opérationnels à savoir ce qui devrait être fait et dans quelle temporalité afin de cadrer la facturation. C’est sûr que si l’opérationnel ne sait pas où en est l’avancement du projet, il n’y aura pas de facturation.
Enfin, la dernière problématique concerne la récupération des bonnes informations pour la finance : savoir quand facturer, qui facturer, quoi et à quel montant. Souvent, on se rend compte que le commercial est très content quand il a signé un nouveau contrat. Il a sa prime. Mais le CRM n’est pas rempli : on n’a pas les informations pour facturer.